Chaudronnée de Mabon…

..ou doux ragoût pour ces temps incertains qui nous font lentement glisser vers la saison sombre.

Entre les temps et les saisons, entre le jour et la nuit, dans les lueurs rougeoyantes du crépuscule, j’errais sans bruit dans le bois. Et je suis arrivée, alléchée par un délicieux fumet miellé, dans une minuscule clairière.
Deux femmes s’y trouvaient. La Vieille, assise sur un banc près de l’entrée de sa demeure, me fixa de son regard perçant et m’invita d’un geste à m’avancer. Je m’arrêtai près des flammes et de la Mère qui s’affairait près du chaudron. Elle me sourit et tendit sa cuillère avant de s’assoir à mes côtés, posant la main sur son ventre arrondit.
C’est là, pendant que je touillais pour elles le contenu du chaudron, qu’elles m’apprirent cette recette.
Et c’est en leur honneur qu’aujourd’hui je te la transmets à mon tour.

Fais revenir un oignon rouge et un morceau de gingembre finement émincé dans de l’huile d’olive. Quand ils seront devenus translucides ajoute une cuillère à soupe de miel (choisis-en un au goût très prononcé). Mêle bien le tout, laisse le miel enrober l’oignon et le gingembre, puis ajoute des tomates (fraîches ou alors du coulis).
Laisse ta sauce épaissir un peu, ajoutes-y de l’origan, du sel, du poivre et du curcuma en poudre (si tu veux l’utiliser frais, ce qui est mieux, attends alors que la cuisson soit sur la fin et préfère-le râpé.)

Quand la sauce aura suffisamment mijoté, plonges-y tes légumes, du potiron (ça marche aussi avec le potimarron,) des carottes, des pommes de terre, des navets, mais également des cèpes si Mabon se montre généreux.
Mêle bien le tout pendant une bonne minute avant de rajouter un peu d’eau bouillante, puis laisse ton ragoût mijoter sagement.

Goulash de cèpes

Entre deux récoltes d’automne, la sorcière avisée rassemble un moment ses énergies et ses ingrédients.

Elle choisit un beau chaudron, prépare des oignons en quantité similaire à celle des cèpes ou des bolets qu’elle a récolté, les émince en fredonnant puis, après les avoir remercié les bulbes pour leurs propriétés anti-rhume, la larme à l’oeil, elle va se laver les mains. Ce sont eux qu’à présent elle va faire chantonner tout doucement dans de l’huile pour les faire fondre. Si tu veux suivre ses pas, fais de même et ajoute, une fois les oignons fondus, des morceaux de pommes de terres pelées, de celles qui restent fermes à la mitonnade.

Laisse la magie s’opérer tout doucement sous le couvercle, le temps de brosser les champignons avec tendresse. Si le jardin le permet, ajoute une ou deux carottes coupées en petits morceaux, une toute petite pincée de grains de carvi, une baie de genièvre, une feuille de laurier séchée, un peu de sauge, de la marjolaine à ta volonté et quelques grains de poivre noir concassés. Pour parfaire le mijoté, verse une raisonnable pincée de sel et la belle quantité de champignons brossés et découpés. Que le feu ensuite se fasse doux, le plus doux possible, car qui veut mitonner longtemps ménage sa flamme pour qu’elle dure. Le couvercle posé là-dessus, tu pourras une heure durant retourner à tes récoltes de pommes, de poires, de noisettes, de cenelles, de pommes de terre ou de noix…

Le chaudron retiré du feu mérite bien, pour ce travail, une cuillerée de crème sure et du repos jusqu’au repas. Après le crépuscule du soir, après avoir contemplé l’or des cieux qui coule sur les feuillages ambrés, tu viendras réchauffer ce goulash des sous-bois afin de le déguster et, bien sûr, de le partager.

 

(c) Lalie Solune

Risotto automnal.

La sorcière se glisse subrepticement dans sa cuisine et aussi vite que deux et deux font quatre, elle remplit d’eau un chaudron (deux à trois litres, selon la quantité de riz), y jette du basilic (avant que l’automne ne lui vole ce plaisir), de l’origan, du thym et un peu de sel. Pendant que sa décoction chauffe doucement, elle coupe deux oignons, deux ou trois carottes, quelques cèpes, écrase un peu d’ail et jette le tout dans un autre chaudron, avec une bonne dose d’huile d’olive.
Elle mêle, touille et laisse cuire ses ingrédients, ajoute un peu de poivre, un peu de sel aussi, mais pas trop (car il ne faut pas oublier que le bouillon est déjà salé), Et quand elle voit que les champignons sont quasiment cuits, elle ajoute dans son chaudron deux belles mesures de riz tout rond.
Pendant deux bonnes minutes elle ne laisse pas en repos ces capricieux grains de riz et les fait rouler sans relâche, jusqu’à ce qu’ils deviennent transparents. Ensuite seulement elle verse sur eux quelques louches de bouillon, pas tout d’un coup, juste de quoi les recouvrir.
Alors elle n’aura de cesse de surveiller et de mêler tout ce beau monde car le sieur risotto est capricieux et il aime la compagnie, il ne faut jamais le laisser seul, sinon ce fainéant fait des bêtises. Aussi, pour l’en empêcher, mieux vaut le mélanger souvent et veiller à ce que jamais ce perpétuel assoiffé ne manque d’eau, ni d’ailleurs n’en ait trop.
Mais la sorcière est patiente, elle a tout le temps, elle peut bien accorder vingt minutes à ce met savoureux. Pour s’occuper elle y ajoute quelques morceaux de châtaignes et, à mi-cuisson, une rasade de vin blanc.
Quand les vingt minutes approchent de leur terme, elle cesse de rajouter de l’eau, laisse boire le riz tout son content et le reste de l’eau s’évaporer. Puis, cela fait, elle ajoute, presque à la toute fin, une cuillère de crème fraîche (si le cœur lui en dit, la crème c’est une question de goût) et surtout une pluie de parmesan (à cela par contre pas moyen d’échapper).
Elle mêle le tout une dernière fois et laisse le risotto se reposer un moment avant d’être dégusté, parce qu’après tout il l’a bien mérité.

(c) Sara Strega