« La cuisine. La cucina, notre vraie mère patrie, la grotte chaude de la bonne sorcière au fin fond du pays désolé de la solitude, ses chaudrons pleins de délicieuses potions qui mijotent sur le feu, une caverne d’herbes magiques, le thym et le romarin, la sauge et l’origan, le baume du lotus qui rend la raison aux aliénés, la paix aux angoissés, la joie aux affligés, cet univers exigu et clos, les fourneaux en guise d’autel, le cercle magique de la nappe à carreaux où les enfants se nourrissaient, ces vieux enfants ramenés à leurs débuts, car le goût du lait maternel hantait toujours leur mémoire, son parfum s’attardaient dans leurs narines, leurs yeux se mettaient à briller, et la méchanceté du monde s’évanouissait quand la vieille sorcière maternelle protégeait sa progéniture contre les loups qui rôdaient au-dehors. »
John Fante Les Compagnons de la grappe, traduit par Brice Mathieussent, éd. 1018.